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Nation-branding à coups de pédale – pour une image de marque nationale plus crédible

Les excellentes performances du coureur luxembourgeois Bob Jungels lors de la 99e édition du Giro d’Italia ont, à maintes reprises, braqué sur le Luxembourg les projecteurs des spectateurs et passionnés du cyclisme ainsi que de la presse internationale. En effet, pendant près d’un mois, le nom du Grand-Duché y est apparu pour des raisons autres que financières ou fiscales. A titre d’exemple, dans son édition du 17 mai 2016, la Gazzetta dello Sport, le plus grand et plus ancien quotidien sportif italien, a loué la capacité « de ce petit pays d’un demi-million d’habitants » à produire des « champions » tels qu’Andy Schleck et Bob Jungels, avant de rappeler les excellentes performances de Charly Gaul dans les années 50.

Une véritable aubaine dans un contexte où le Grand-Duché peine à se détacher des étiquettes qui lui ont été accolées suite à l’affaire Luxleaks (et même avant). Et ceci alors que le processus de nation-branding, lancé en 2014, entend modifier la perception du Luxembourg à l’étranger et faire en sorte que celle-ci « ne soit pas axée sur la place financière », comme l’avait expliqué Francine Closener dans une interview parue dans l’essentiel.

Pourtant, la stratégie nation branding ne semble guère convaincre les esprits, à en croire les réactions parues dans la presse internationale. Les Echos l’ont qualifiée de « vaste psychothérapie collective pour se faire aimer du reste du monde », ainsi que d’une « vaste démarche participative » qui aurait débouché sur « un trio d’adjectifs passe-partout » : Ouvert, fiable et dynamique. Dans un article sur le même sujet paru dans le New York Times, le fondateur du concept de « nation branding », Simon Anholt, a pour sa part indiqué que de telles campagnes sont perçues comme « de la propagande d’un gouvernement étranger ». « Pour rester poli, disons que l’accueil a été circonspect », juge le journaliste Jean-Pierre Stroobants, dans un article critique paru dans « Le Monde ».

Si le CSJ reconnaît la nécessité d’accorder le temps utile à une telle stratégie pour qu’elle puisse produire ses effets, il estime néanmoins que la médiatisation positive du Luxembourg dans le cadre du Giro d’Italia, obtenue à coups de pédale, souligne la nécessité d’accorder, dans la stratégie du nation branding, une importance beaucoup plus grande au sport, mais aussi à la culture et au tourisme, plus souples, plus authentiques, plus crédibles, plus immédiats et plus populaires. Le CSJ craint que le gouvernement ne soit trop aveuglé par son obsession de marketing commercial pour percevoir le véritable potentiel que ces domaines offrent en termes d’image de marque.

Pour ce qui est du sport, la petite taille du pays retient un potentiel largement sous-estimé. En effet, à chaque fois qu’un sportif ou une équipe luxembourgeoise participent à une compétition importante, sa qualité de « nain », d’« outsider » est à même de lui attirer grand nombre de supporters, dans une optique de « David contre Goliath ». L’incroyable épopée des ‘Foxes’ de Leicester City, ayant réussi à remporter d’une manière inattendue le titre d’Angleterre, doit servir d’exemple. En soutenant ses sportifs de haut niveau, et en misant d’avantage sur ses jeunes talents, le Luxembourg peut rapidement parvenir à redorer son image. Et pourquoi pas en s’inspirant, au niveau du football, de la voie tracée par ses voisins, les Diables rouges… Le CSJ estime que la possibilité qu’une étape du Tour de France en 2017 soit accueillie par la Ville d’Esch/Alzette représente une grande opportunité en matière de nation branding.

En ce qui concerne la culture, il ne s’agit pas de dénaturer celle-ci, de l’instrumentaliser à des fins autres que celles qui lui sont intrinsèques, mais d’accorder l’importance nécessaire à sa dimension extérieure. Par exemple, en évitant de répéter l’erreur d’annuler la tournée en Chine de l’Orchestre Philharmonique du Luxembourg suite à des coupes budgétaires. Les gains en termes d’attractivité, de notoriété, de réputation, d’influence culturelle que celle-ci aurait pu procurer à notre pays auraient été d’autant plus importants qu’il s’agissait de la Chine – un géant politique, économique et démographique. L’influence culturelle d’un pays ne peut être obtenue via l’annulation de ses performances culturelles à l’étranger. Le CSJ tient par ailleurs à rappeler que le budget consacré au Nation Branding est en soi déjà élevé, alors que les résultats en sont pour le moins incertains.

En outre, dans une optique de nation branding, une participation au Concours Eurovision de la chanson serait plus que souhaitable. Pour rappel, le Luxembourg en est un des sept fondateurs et y a participé jusqu’en 1993. Il a par ailleurs remporté la victoire à cinq reprises. Une victoire du Luxembourg dans cette compétition qui cette année, a été suivie par près de 200 millions de téléspectateurs, vaudrait bien une (ou plusieurs) stratégie(s) de nation branding.

Pour ce qui est du tourisme, le CSJ souligne l’importance de poursuivre les efforts afin de promouvoir à l’extérieur les lieux touristiques au sein du Grand-Duché. Il estime que la possibilité que les villes du sud du Luxembourg, regroupées dans le syndicat Pro-Sud, puissent devenir « capitale européenne de la culture en 2022 » représente une immense opportunité.

Pour conclure, le CSJ appelle le gouvernement à revoir son approche face à la stratégie de nation-branding, et à la rendre plus crédible en accordant davantage d’importance au sport, à la culture et au tourisme. Une telle approche serait à même de rendre superflue, dans une optique de nation-branding, la participation coûteuse du Grand-Duché à l’exposition universelle de Dubaï en 2020, ayant permis la mise au placard de l’ancienne ministre de la Culture, Maggy Nagel.

Dësen Communiqué eroflueden